Je me souviens de la rentrée...
Je me souviens que c'était plutôt fin septembre-début octobre : à l'époque la récolte des pommes de terre passait avant l'école. On travaillait moins, mais on savait lire.
Je me souviens du Cher Frère qui avait expliqué la règle du jeu : il mettait un "B" en face de chaque bonne réponse, et en rayait un autre à chaque faute : le solde des "B" en fin de mois déterminait la nature de la médaille qu'on porterait.
Je me souviens du Lycée sinistre en brique rouge, au chef-lieu du 51, en haut d'un immense escalier, de la peur qu'on avait du "surgé", et de nos rires à cause de "la censeur". Je me souviens de la prof de latin, cheveux longs emmêlés, habillée d'un sac, enceinte, nulle, qui voulut me faire redoubler parce qu'elle m'avait confondu avec un autre.
Je me souviens des trains d'avant-guerre, fumants, gare du Maine, qui mettaient 4 heures pour faire 250 km, avec arrêt à Malicorne, et nous emportaient (déportaient?) dans une petite ville où nous n'étions, avec les oies, que la seule trace de vie....
Je me souviens que le lendemain de la rentrée, nous fûmes inondés. Un mètre d'eau entre les bâtiments. Le temps que la strass installe des planches sur des parpaings, on est resté dans les dortoirs sans petit-dèje.
Je me souviens du prof de français de seconde qui, pour asseoir son autorité (?), décida que son premier cours serait fait en hurlant sur une victime expiatoire envoyée au tableau... Il s'est calmé ensuite, mais quelle journée!
Je me souviens de notre désespoir en voyant que le prof d'anglais serait M B., dit le jeune B., parce que son père, le vieux B., était aussi prof d'anglais au même bahut. Son truc à lui était de dire le lundi matin "maintenant nous allons faire UN THÈME...", d'un ton volontairement sadique. Je me souviens m'être dit après que ce n'était pas la peine de faire 7 ans d'anglais pour ne pas savoir demander son chemin à Londres.
Je me souviens du plaisir de retrouver le prof de maths, M Aubert, et le prof de physique, M Grimaud, qui eux étaient sérieux, et faisaient tout pour qu'on réussisse. C'est vrai que c'était en taupe, et pas au lycée.
Et le prof de français, M Landy, violoniste comme Ingres, qui nous expliquait tout si bien. Je me souviens que pour la première fois, il n'y avait pas de pions pour nous surveiller : il n'y avait pas d'heures plus studieuses. J'en conclus que c'est la présence des pions qui crée le chahut. CQFD.
Je me souviens d'une rentrée toute particulière, en 1967, un beau matin de septembre, en haut de la Montagne. Ça ne pouvait qu'être mieux, et ça l'a été. Je me souviens avoir culpabilisé en me promenant dans Paris un mardi après-midi : comment peut-on se promener alors que normalement il y a "école"?
Mais l'année suivante, en 68, à cause des "événements", au lieu de retrouver nos cours, on nous a envoyés camper au milieu des bois. En rentrant en février, c'est tout juste si on savait encore lire et écrire. Les généraux espéraient-ils nous mater?
Et puis après, il n'y a plus eu de "rentrée". On rentrait de vacances, tout simplement.
Mais je me souviens de la pitié que je ressens toujours quand je vois ces gosses accompagnés de leur maman le premier jour... Les pauvres d'eux!
De la curiosité ... Avant toute chose.... Sur des sujets divers... Sans oublier des coups de gueule, Et des provocations! De l'humour, toujours. Du premier degré, jamais!
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3 commentaires:
C'est touchant: les souvenirs d'un siècle révolu donnent une teinte de nostalgie, un peu comme les matin frais de septembre brûnissent les feuilles vertes d'un été qui s'éloigne. Dans cet hommage à vos maîtres, vous me faites penser à Gaxotte. Vous ne m'en voudrez Pas ?
Anonyme : donnez vous un nom. C'est pénible !
A Slobodan
je suis un oiseau de passage ou plutôt un lépreux qui ne peut s'empêcher de sortir de sa grotte pour voir un peu de lumière.
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