Je ne sais pas où j'ai trouvé ça, mais j'ai j'ai pensé que ça pouvait intéresser les managers. C'est à un pot de fin d'année, le discours du big boss.
François
En ce début d’année, nous nous
retrouvons pour les traditionnelles salutations. Avant tout, je voudrais vous
souhaiter à tous – collaborateurs, actionnaires, stakeholders- et à tous ceux
qui vous sont chers, une bonne et heureuse année. Je désire vous remercier
cordialement pour votre engagement quotidien au service de notre entreprise et
de notre business.
Comme nous sommes des personnes et non des
matricules, je souhaite tout particulièrement me souvenir de ceux qui, au cours
de cette année, ont achevé leur service parce qu’ils sont partis en retraite, ou dans d’autres sociétés, ou parce qu’ils sont décédés. Mes pensées et ma gratitude vont
également à eux tous et à leurs proches.
Et je voudrais que notre rencontre
d’aujourd’hui et les réflexions que je vais partager avec vous, servent pour
nous tous d’appui et nous poussent à un véritable examen de conscience afin de réussir la prochaine année.
En pensant à ce pot annuel, m’est
venue à l’esprit l’image de l’Entreprise en tant que corps vivant. Le corps ne
fait qu’un, il a pourtant plusieurs membres ; et tous les
membres, malgré leur nombre,
ne forment qu’un seul
corps. Il y règne cependant une diversité de membres et de fonctions. Unique
est notre Vision Stratégique pour le bien de l’Entreprise à la mesure de ses
richesses et des exigences du service.
En réalité, notre Etat-Major est un
corps complexe, composé de tant de directions, de sous-directions, de commissions,
de fonctionnels, et de nombreuses entités qui n’ont pas toutes les mêmes
tâches, mais sont coordonnées pour fonctionner de manière efficace, disciplinée
et exemplaire, en dépit de la diversité culturelle, linguistique et nationale
de ses membres.
Quoi qu’il en soit, l’Etat-Major étant
un corps dynamique, celui-ci ne peut vivre sans se nourrir et sans se soigner.
De fait, l’Entreprise ne peut vivre sans avoir un rapport, personnel,
authentique et solide avec notre Vision. Un membre de l’Etat-Major qui ne partage
pas pleinement cette Vision, deviendra un bureaucrate (un formaliste, un
fonctionnaire, un simple employé) : une branche qui se dessèche, meurt peu à
peu, et finit par être jetée.
L’Etat-Major est appelée à s’améliorer,
à s’améliorer en permanence pour pleinement mener à bien sa mission. Pourtant,
comme tout corps, comme tout corps humain, il est exposé aussi aux maladies, au
dysfonctionnement, à l’infirmité. Et je voudrais mentionner ici certaines de
ces probables maladies, les « maladies du sommet ». Ce sont des maladies assez
communes dans notre vie d’Etat-Major. Ce sont des maladies et des tentations
qui affaiblissent notre service au Client.
- La maladie de celui qui se sent « immortel », « immunisé » ou tout à fait « indispensable » et néglige les contrôles nécessaires et habituels. Un membre du staff qui ne fait pas son autocritique, ne s’ajuste pas en permanence, ne cherche pas à s’améliorer, est un corps malade, infirme. Une simple visite au cimetière nous permettrait de voir les noms de nombreuses personnes, dont certaines pensaient peut-être qu’elles étaient immortelles, immunisées et indispensables ! C’est la maladie de l'homme riche et insensé qui pensait vivre éternellement et de tous ceux qui se transforment en maîtres et se sentent supérieurs à tous, et non au service de tous. Elle découle souvent de la pathologie du pouvoir, du « complexe des élus », du narcissisme qui consiste à regarder passionnément sa propre image et à ne plus voir l’Entreprise.
- Autre maladie : l’activité excessive. Elle concerne ceux qui se noient dans le travail et négligent inévitablement « la meilleure part. C’est pourquoi je vous demande de vous reposer un peu, car négliger le repos nécessaire conduit au stress et à l'agitation. Le temps du repos, pour celui qui a mené à bien sa mission, est une nécessité, un devoir, et doit être vécu sérieusement : en passant un peu de temps avec sa famille et en respectant les jours fériés. Il y a un moment pour tout.
- Il y a aussi la maladie de la « pétrification » mentale et spirituelle. Ceux qui en sont atteints possèdent un cœur de pierre et une « nuque raide » Ce sont ceux qui, chemin faisant, perdent leur sérénité intérieure, la vivacité et l’audace, et se cachent derrière leurs dossiers, devenant les « rois du formulaire » et non des managers. Il est dangereux de perdre cette sensibilité humaine qui permet de pleurer avec ceux qui pleurent et de se réjouir avec ceux qui se réjouissent. Car, au fil du temps, leur cœur se durcit et devient incapable d’animer leur équipe. Être manager, en fait, signifie avoir les dispositions à l'humilité et au don, au détachement et à la générosité.
- La maladie de la planification excessive et du fonctionnarisme. Quand un manager planifie tout minutieusement et croit que planifier à la perfection fait réellement avancer les choses, il se transforme pratiquement en expert-comptable ou en fiscaliste. Tout bien préparer est nécessaire mais il ne faut jamais succomber à la tentation de vouloir enfermer ou trop piloter la liberté de nos collaborateurs, qui demeure toujours plus grande, plus intelligente que toute planification humaine. On se laisse gagner par cette maladie parce qu’il est toujours plus facile et plus commode de se caler dans ses propres positions statiques et inchangées. La réussite est « fraîcheur, imagination, nouveauté ».
- La maladie de la mauvaise coordination. Quand il n’existe plus de Vision commune et que le corps est privé de son fonctionnement harmonieux en devenant un orchestre qui produit seulement du chahut, parce que ses membres ne collaborent pas et ne vivent pas l’esprit d’équipe. Lorsque le pied dit au bras : « je n'ai pas besoin de toi » ou la main à la tête : « c'est moi qui commande », provoquant ainsi malaise et scandale.
- Il y a aussi la maladie d’« Alzheimer », c’est-à-dire l’oubli de notre culture d’Entreprise, de son histoire personnelle. Il s'agit d'un déclin progressif des facultés relationnelles qui, à plus ou moins long terme, provoque de graves handicaps chez la personne, la rendant incapable d'exercer une activité autonome. Celle-ci vit dans un état de dépendance absolue vis-à-vis de ses vues souvent imaginaires. Nous détectons cette maladie chez ceux qui ont perdu la mémoire de leur arrivée dans l’Entreprise ; chez ceux qui ne perçoivent pas le sens historique de notre action ; chez ceux qui sont totalement dépendants de leur présent, de leurs passions, caprices et manies ; chez ceux qui construisent autour d'eux des murs et des habitudes et deviennent de plus en plus esclaves des idoles qu'ils ont sculptées de leurs propres mains.
- La maladie de la rivalité et de la vanité . Quand l’apparence, le style vestimentaire, les signes honorifiques deviennent le premier objectif de la vie, et que l’on oublie les préceptes : « Ne soyez jamais intrigants ni vaniteux, mais ayez assez d’humilité pour estimer les autres supérieurs à vous-mêmes. Que chacun de vous ne soit pas préoccupé de ses propres intérêts ; pensez aussi à ceux des autres » : c'est la maladie qui nous pousse à être des hommes et des femmes faux et à vivre un faux activisme, et un faux management. Ils mettent leur gloire dans ce qui fait leur honte.
- La maladie de la schizophrénie existentielle. C’est la maladie de ceux qui ont une double vie, fruit de l’hypocrisie typique du médiocre et du vide spirituel progressif que les diplômes et les titres académiques ne peuvent combler. Une maladie qui frappe souvent ceux qui, abandonnant le service opérationnel, se limitent aux tâches bureaucratiques et perdent ainsi le contact avec la réalité, avec les personnes concrètes. Ils créent ainsi un monde parallèle, à eux, où ils mettent de côté tout ce qu'ils enseignent sévèrement aux autres et où ils commencent à vivre une vie cachée et souvent dissolue. La remise en cause et les visites terrain sont assez urgentes et indispensables pour lutter contre cette maladie extrêmement grave.
- La maladie de la rumeur, de la médisance, et du commérage. C’est une maladie grave, qui commence simplement, peut-être seulement pour faire un brin de causette, et qui s’empare de la personne. Celle-ci se met alors à « semer de la zizanie » et dans beaucoup de cas à « assassiner de sang froid » la réputation de ses propres collègues. Mes amis, gardons-nous du terrorisme des bavardages !
- La maladie qui consiste à diviniser les chefs. C’est la maladie de ceux qui courtisent leurs supérieurs, en espérant obtenir leur bienveillance. Ils sont victimes du carriérisme et de l’opportunisme, ils honorent les personnes sans profit pour l’Entreprise. Ce sont des personnes qui vivent le service en pensant uniquement à ce qu'ils doivent obtenir, et non à ce qu'ils doivent donner. Des personnes mesquines, malheureuses, et inspirées seulement par leur égoïsme fatal. Cette maladie pourrait frapper aussi les supérieurs quand ils courtisent certains de leurs collaborateurs pour obtenir leur soumission, leur loyauté et leur dépendance psychologique, mais il en résulte au final une véritable complicité.
- La maladie de l’indifférence envers les autres. Elle survient quand chacun ne pense qu’à soi et perd la sincérité et la chaleur des relations humaines. Quand le plus expert ne met pas ses connaissances au service des collègues qui le sont moins. Quand on vient à apprendre quelque chose et qu’on le garde pour soi au lieu de le partager de manière positive avec les autres. Quand, par jalousie ou par ruse, on éprouve de la joie à voir l'autre tomber au lieu de le relever et de l'encourager.
- La maladie du visage lugubre. Elle est celle des personnes bourrues et revêches, qui estiment que pour être sérieux il faut porter le masque de la mélancolie, de la sévérité, et traiter les autres – surtout ceux que l’on considère comme inférieurs – avec rigidité, dureté et arrogance. En réalité, la sévérité théâtrale et le pessimisme stérile sont souvent les symptômes d’un sentiment de peur et de d’insécurité. Le manager doit s'efforcer d'être une personne courtoise, sereine, enthousiaste et joyeuse qui transmet la joie quel que soit l’endroit où il se trouve. Un cœur vaillant est un cœur heureux qui irradie et communique sa joie à tous ceux qui l'entourent : cela se voit tout de suite ! Ne perdons donc pas cet esprit joyeux, qui sait manier l'humour, et même l'autodérision, qui font de nous des personnes aimables même dans les situations difficiles. Comme une bonne dose d'humour sain nous fait du bien, soyez « fun » !
- La maladie qui consiste à accumuler. Souffre de celle-ci le collaborateur qui cherche à combler un vide existentiel dans son cœur en accumulant les biens matériels, non pas par nécessité, mais seulement pour se sentir en sécurité. En réalité, nous ne pourrons emporter avec nous rien de matériel parce que le coffre-fort ne suit pas le corbillard, et tous nos trésors terrestres – même si ce sont des cadeaux – ne pourront jamais combler ce vide. Au contraire, ils le rendront encore plus exigeant, et plus profond. L'accumulation ne fait que nous alourdir et ralentir inexorablement notre chemin ! Nos déménagements trop volumineux sont un signe de cette maladie.
- La maladie des cercles fermés, quand l’appartenance à un petit groupe devient plus forte qu'à celle de l’Entreprise. Cette maladie elle aussi commence toujours par de bonnes intentions, mais au fil du temps, elle asservit ses membres, devient un cancer qui menace l’harmonie de la structure et cause tellement de mal – des scandales. L'autodestruction ou le « tir ami » des frères d’armes est le danger le plus sournois. C'est le mal qui frappe de l'intérieur.
- Et la dernière, la maladie du profit mondain, des exhibitionnismes (17). Elle est celle du collaborateur qui transforme son service en pouvoir, et son pouvoir en marchandise pour obtenir des profits mondains, ou davantage de pouvoir. C’est la maladie des personnes qui cherchent insatiablement à multiplier les pouvoirs et dans ce but, ils sont capables de calomnier, de diffamer, de discréditer les autres, jusque dans les journaux et les magazines. Naturellement, dans le but de s'afficher et de montrer qu'ils sont davantage capables que les autres. Cette maladie fait elle aussi beaucoup de mal à notre image de marque parce qu'elle conduit les personnes à justifier l’usage de n’importe quel moyen pour atteindre ce but, souvent au nom de la justice et de la transparence ! Il me vient à l'esprit le souvenir d'un jeune cadre qui mettait sur son blog des informations pour raconter – et inventer – des choses privées et personnelles sur ses collègues et ses clients. Pour lui, seul comptait le fait de se voir follower, parce qu'ainsi il se sentait « puissant et irrésistible ». Il faisait tellement de mal aux autres et à l’Entreprise. Le pauvre !
Chers collègues, de telles maladies et
de telles tentations sont naturellement un danger pour toute organisation,
service, filiale, etc. Et elles peuvent frapper au niveau individuel ou collectif.
La guérison doit être le fruit de
la conscience de la maladie et de la décision personnelle et collective de se
soigner en supportant le traitement avec patience et persévérance. J’ai lu un jour que les entreprises sont
comme les avions : elles ne font la une des journaux que lorsqu’elles s’écroulent
à Wall Street, mais il y en a beaucoup qui volent. Beaucoup critiquent et peu agissent
pour elles.
Je vous verrai bientôt en tête à tête pour parler de tout ça. D’ici-là, profitez de votre famille pour les fêtes.
Je vous verrai bientôt en tête à tête pour parler de tout ça. D’ici-là, profitez de votre famille pour les fêtes.
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